Une nouvelle page vient de s’écrire dans l’absurdité de notre démarche de réindustrialisation.
Vencorex, qui produit des composés chimiques rares entrant dans les formulations propulsives des missiles nucléaires français, vient d’être cédée à son concurrent chinois.
Les salariés demandaient pourtant 4 semaines de plus pour boucler le financement de leur projet de reprise sous la forme d’une SCIC. Ils avaient déjà reçu l’engagement de clients stratégiques comme Framatome et ArianeGroup.
Seuls 54 emplois seront repris par le groupe chinois Wanhua. L’usine en comptait 450 en septembre dernier, avant son placement en redressement judiciaire par son actionnaire, le groupe thaïlandais PTT GC.
Ce groupe souhaitait se désengager d’une entreprise qu’il jugeait peu rentable. Il avait d’ailleurs cessé d’y investir. Ceci avait encore dégradé la situation concurrentielle de l’entreprise face à son principal rival : Wanhua qui devient donc son repreneur.
Ce dernier a soumis Vencorex à une pression terrible. Lui bénéficie de capacités industrielles modernes et d’un soutien étatique massif. Il a ainsi pu inonder notre marché de produits à bas prix sans générer la moindre réaction protectionniste de notre part.
Pire, nous avons soumis Vencorex (et nos autres entreprises) à une succession de décisions qui ont considérablement augmenté ses coûts de production. Oui, parce que faire de la chimie, c’est très consommateur d’énergie, donc c’est mal.
Il y a d’abord le fait d’avoir maintenu artificiellement des coûts électriques hauts.
Il y a aussi :
– REACH (nos entreprises doivent tester, enregistrer et documenter les substances chimiques produites ou importées). Bonne intention européenne. Coût de conformité malheureusement très élevé.
– L’IED (pour réduire les émissions industrielles dans l’air, l’eau et le sol). Bonne intention qui exige : Les meilleures techniques disponibles, des audits environnementaux fréquents, des autorisations strictes… Des coûts de mise à niveau élevés.
– Les quotas carbone (les industries à forte intensité énergétique achètent des quotas CO₂). Bonne intention ! Nos concurrents asiatiques n’y sont pas soumis. C’est bête.
L’arrivée du Green Deal, plein de super hyper bonnes intentions, a dû finir de convaincre l’actionnaire de Vencorex que faire de la chimie en France n’était pas très bien vu.
Récemment, j’écrivais que l’enfer industriel était pavé de bonnes intentions écologiques… On m’a dit que j’étais climato-provocateur. Alors, permettez-moi de me rattraper auprès des bonnes consciences que j’ai choquées, en les encourageant : Encore un effort et on arrivera au zéro émission de Vencorex… en fermant définitivement son usine. On pourra alors importer à grands coups de CO₂ la production de pays qui ont de moins bonnes intentions que nous.
Courage (et respect) aux ouvriers qui vont perdre leur emploi.