Chères résistantes, chers résistants, chers soutiens,
La répétition des crises augmente sa cadence depuis quelques années, donnant l’impression que notre système est à bout de souffle.
Et, dans ces moments-là, on a tous tendance à chercher les raisons de nos problèmes dans l’actualité récente.
Déformation d’apprenti historien, j’aime, quant à moi, regarder dans un passé plus lointain ce qu’auraient dit les grandes figures d’antan. Ce qu’auraient fait nos aïeux face à des événements similaires.
Et, à force de chercher des comparaisons, on se rend compte qu’il y a en France, comme dans d’autres pays, de singulières et antiques manies qui continuent à se manifester aujourd’hui. Des sortes de biais cognitifs de notre cerveau civilisationnel qui s’expriment toujours de la même manière, face à des événements semblables. Sans vraiment apprendre des erreurs passées.
« On ne change pas. On met juste les costumes d’autrui et voilà », disait une philosophe antique. C’est à peu près ça. (Je laisse ceux dont la culture est suffisante indiquer aux autres qui est l’auteur de cette maxime en bas de cet article).
L’un des mots avec lequel nous aimons le plus nous qualifier, nous Français, c’est le panache. Il y avait aussi la mauvaise humeur, comme trait national, mais c’est moins chic.
Et c’est vrai qu’on a souvent une bonne image de cette sorte de geste un peu fou qu’on manifeste face à une situation qu’on a généralement à peine étudiée. Une sorte de posture magnifique qui méprise le danger. Capable de renverser un adversaire qui nous croyait à genoux… Ou de nous faire prendre des risques inconsidérés là où tout aurait pu se passer tranquillement si on n’avait pas voulu en mettre plein la vue à la galerie.
En ce moment, je lis un peu partout la grogne monter contre l’Europe. Et c’est vrai que des politiques comme la PAC sont franchement mal conçues.
Mais à bien y regarder, les choses auraient pu se passer bien mieux pour nous si nous n’avions pas décidé d’être les champions du monde de l’européanisme. Si nous n’avions pas mis un point d’honneur à faire plus et mieux que les autres. Si nous ne cherchions pas à montrer à quel point on privilégie le collectif à nos intérêts nationaux. Laissant ces Anglo-Saxons aux esprits étriqués compter leurs sous face à notre magnificence comme les médiocres qu’ils sont. Pouah !
Et c’est ainsi que, non contents de ne pas suffisamment défendre, en amont, nos intérêts en discutant âprement les textes qui s’appliqueront à tous, nous les surtransposons. C’est-à-dire que nous les appliquons avec encore plus d’exigence que nos voisins. Sans doute pour montrer qui c’est le champion.
Lors d’une de nos soirées FFI, Arnaud Montebourg nous racontait ce qu’il avait vécu : « Les Allemands construisaient l’Allemagne, les Portugais le Portugal, les Italiens l’Italie… Nous, nous construisions l’Europe ! »
Voilà pourquoi nous ajoutons des normes nationales aux normes, déjà très exigentes, qui descendent de Bruxelles. Et que certaines collectivités locales en ajoutent encore d’autres. Au grand dam de nos agriculteurs, de nos industriels, de nos énergéticiens, de ceux qui bâtissent nos logements…
Je me suis dit un moment que cette posture était faite pour faire bonne figure auprès de ceux qui crient à l’inaction climatique. Mais j’ai compris, depuis, qu’il n’en était rien. Ces gens-là prennent rarement le temps de se documenter avant de s’indigner. Ils auront toujours cette posture, quels que soient nos efforts.
Bref, les amis, si nous sommes le pays qui se contraint le plus et qui fait le moins attention à son intérêt national… C’est probablement pour crâner devant nos camarades de classe lors de la remise des notes.
Soyons fiers, il n’y a pas de meilleur élève que nous !
Les autres, eux, se dépêchent de transcrire les règlements qui les arrangent. Et traînent, de bonne guerre, la patte quand ce n’est pas le cas. Quitte à passer pour des cancres ou des mauvais joueurs. Des qualificatifs dont ils se moquent, visiblement.
Voilà pourquoi, s’il faut toujours se méfier d’une superstructure bureaucratique comme l’UE, ne cherchons pas systématiquement sa responsabilité pour expliquer des malheurs que l’on se crée nous-mêmes.
C’est beaucoup plus notre approche de l’Europe, et non l’Europe en elle-même, qui n’est pas la bonne. Bruno Le Maire avait dit que le temps de la naïveté française était révolu. On attend de voir.