Autant vous le dire tout net, une fois n’est pas coutume, je me suis refusé à tremper ma plume dans l’encre de notre actualité. Cette semaine, elle était bien trop lourde, opaque, complexe et explosive pour donner à ces lignes la légèreté recherchée. En plus, je n’arrive jamais à écrire Priogine correctement ni à placer Rostov-sur-le-Don sur une carte du Cantal. Alors, autant parler d’autre chose. Je vais donc vous raconter une histoire personnelle et vous faire part des réflexions qu’elle m’a inspirées.
Cela faisait trois semaines que j’enchaînais les déplacements et les événements.
J’ai donc entamé mon week-end dans un état de fatigue avancé. Ma femme et mes enfants m’ont donc suggéré, une arme à la main, de faire une vraie coupure et de ne pas écrire ce week-end. J’en avais accepté le principe quand j’ai commencé la lecture d’un article du Figaro sur Bernard Arnault.
Le patron de LVMH s’exprime très peu dans la presse. Alors, quand il parle, ce n’est pas pour ne rien dire. J’ai trouvé cette interview pleine de recul et de lucidité sur l’art de mener une entreprise et de valoriser ses marques. Je me suis dit qu’elle allait intéresser notre communauté. Notamment ce qu’il dit sur la croissance et le profit, qui ne doivent pas être considérés comme un objectif mais comme une conséquence de cet objectif (lisez-le, c’est intéressant).
Nous étions samedi, il était 18h50. J’avais un peu moins d’une heure avant de passer à l’apéro et ni ma femme ni mes enfants ne me surveillaient. J’ai donc pondu rapidement un article, l’ai mis en ligne sur notre page LinkedIn en me disant qu’au pire ça me ferait des idées intéressantes à reprendre lors des prochaines conférences FFI. Car poster un texte sur LinkedIn un samedi à 19h45… Autant vous dire que je ne m’attendais pas à toucher les foules.
C’était sans compter sur les incroyables fantasmes que l’homme le plus riche du monde (juste devant Gilles ATTAF et Emmanuel DELEAU) inspirent à nos compatriotes. Les premiers messages sont arrivés pendant le dîner. Puis d’autres ont surgi en soirée, toujours plus agressifs. D’autres encore venaient en soutien, ulcérés par les attaques énoncées.
Vu que certains critiques m’ont pris personnellement à partie, j’ai sauté dans l’arène, une épée lyrique à la main.
Ça parlait… pardon… ça gueulait dignité, écologie, vertu, complot, fraudes fiscales, domination, nation, arnaque… Les vieilles lunes anticapitalistes donnaient des leçons que les admirateurs de l’entrepreneur leur renvoyaient au visage. Moi, évidemment, j’ai répondu à tout le monde. Remerciant ceux qui avaient le bon goût de me féliciter (des gens formidables, reconnaissez-le). Chargeant ceux qui pensaient pouvoir balancer une formule anti-industrie sur la page FFI et s’en tirer indemne.
Bilan, 300 000 vues en 24 heures… pas mal pour un post pré-apéro. Le problème c’est que j’ai passé mon dimanche à faire de la modération sur LinkedIn (et un peu de provoc’ aussi).
Autre bilan : Si je conçois qu’on puisse critiquer certaines de ses pratiques et son histoire, (où il n’a pas hésité à fermer des usines en France à une certaine époque, avant d’en rouvrir de plus belle) la haine suscitée chez certains est clairement excessive. Elle est digne d’un grand criminel.
Et vus certains commentaires (encore une fois, je ne parle pas de ceux qui critiquent objectivement le personnage), on peut considérer que l’irrationnel qui s’était cristallisé, il y a 40 ans, autour de notre industrie et de ses dirigeants pour en faire un système oppressif à abattre ne s’est pas complètement dissipé. Il s’exprime différemment et a fait évoluer ses arguments. La critique sociale a fait place à la critique sociétale et environnementale, voilà tout.
Alors, à l’heure où un vent de #reindustrialisation souffle enfin sur notre pays, à l’heure où #entrepreneur n’est plus un gros mot, n’oublions pas de faire entendre nos voix pro-industrie dans cette engueulade géante qu’est devenue l’opinion publique française. Car l’histoire a démontré à plusieurs reprises qu’une minorité remuante a souvent pris le dessus sur une majorité silencieuse.
Alors, mes amis, à vos trompettes !