Souvenez-vous. En avril dernier, nous avions relayé la lettre ouverte écrite par Arnaud Montebourg au gouvernement. L’ancien ministre de l’Économie alertait son successeur des dangers que représentait le rachat du groupe Velan par Flowserve. Et si certains ont pu s’étonner, à l’époque, que le rachat d’un groupe canadien (Velan) par un groupe américain (Flowserve) représente une menace pour la souveraineté industrielle française, c’est que le diable vient souvent se nicher dans le détail.
En l’occurrence, le détail n’en est pas un pour notre industrie de défense
Car il était convenu que Segault, une entreprise située dans le Département de l’Essonne, appartenant à Velan, fasse partie de ce deal. Et Segault fabrique des robinets et des clapets.
Alors, c’est vrai, « Robinets » et « clapets » n’ont pas le lustre lexical de certains mots pompeux. Mais quand ils sont accolés à des adjectifs comme « nucléaire », ils deviennent instantanément stratégiques. En réalité, ce sont des pièces indispensables à la construction de nos centrales nucléaires et de nos sous-marins français.
Or, la loi américaine autorise son Département d’État à récupérer tous les secrets de fabrication de l’ensemble de ses entreprises compatriotes. Elle lui permet également de bloquer tout contrat de ces entreprises avec des pays qui lui déplairaient.
En pratique, Segault pourrait se voir interdire de fournir ses robinets et clapets à nos centrales et nos sous-marins d’un simple trait de plume. Tout en livrant les secrets qui font que nos sous-marins sont souvent jugés meilleurs que ceux de l’Oncle Sam.
L’humiliante affaire des sous-marins australiens a montré à quel point notre industrie de défense était concurrente de la leur. Elle nous a également rappelé que la conception américaine du mot « allié » n’excluait pas une importante dose de déloyauté. Voilà pourquoi le passage de Segault sous bannière étoilée a tant inquiété nos généraux.
La vigilance d’Arnaud Montebourg a donc été salutaire
Il a invité notre gouvernement à utiliser le décret qu’il avait lui-même édicté en son temps afin de bloquer la vente. Des militaires de haut rang avaient aussi pris la parole sur ce sujet. Mais le bruit de l’affaire avait globalement été couvert par celui des polémiques du moment. Les retraites, les retraites et aussi les retraites…
Eh bien, Mesdames et Messieurs, j’ai le plaisir de vous annoncer que Sébastien Lecornu, ministre des Armées, a annoncé mardi qu’il avait l’intention de bloquer cette vente !
Bruno Le Maire et Roland Lescure ont déclaré à plusieurs reprises qu’il était grand temps de sortir de l’ère de la naïveté industrielle française.
Grâce à la vigilance des uns, l’écoute et les décisions tranchées des autres, le cas Segault en est un signe incontestable.
Bravo les amis !